Vous dansez ?

Une vie obstinée
Second volet de notre immersion dans l’univers de Catherine Diverrès, avec un regard rétrospectif sur son parcours, à partir de ce qui fut son présent quand elle dirigeait le Centre Chorégraphique National de Rennes et de Bretagne.
En 2005, Hervé Portanguen suit Catherine Diverrès, entre le travail au quotidien avec la compagnie et l’action de sensibilisation et de formation. Il l’amène à se remémorer son parcours, au travers de quelques captations où on la voit danser. Retour aux sources avec Instance, en 1983, titre de l’étonnant duo avec son comparse d’alors, Bernardo Montet. Ils y posent un style d’une extrême violence et, tout à la fois, une extrême rapidité et une extrême lenteur… renonçant à gigoter comme il est convenu de le faire dans un spectacle de danse. C’est la rupture, avec une partie du public, et la reconnaissance aussi, dans une période où la danse contemporaine gagne ses lettres de noblesse. Autre moment décisif, quand Catherine Diverrès rencontre Kazuo Ohno, le pionnier du butō, un homme dont la philosophie confirme ses intuitions. La danse comme un lien entre l’infiniment petit et l’infiniment grand, entre les vivants et les morts. Il y a grâce et légèreté, quand il y a densité et gravité mentale.
VOUS DANSEZ ? CATHERINE DIVERRÈS
VOUS DANSEZ ? CATHERINE DIVERRÈS
un film de Hervé Portanguen (2006 - 52')
Catherine Diverrès est un personnage singulier. Venue du classique, elle esquive les courants dominants de la danse contemporaine des années 70/80 pour chercher des réponses dans le butō, la littérature et de philosophie. Sa danse, reconnue sur la plan international, se veut engagement, mais poésie aussi, interrogation permanente de son art. La critique ne s’y trompe pas qui lui reconnaît une place à part sur la scène chorégraphique nationale.
À Rennes, pendant une dizaine d’années j’ai pu faire sa connaissance et celle de l’équipe qu’elle dirige, dans le cadre de reportages : répétitions, filages, extraits des créations, ateliers animés par d’autres chorégraphes, entretiens… Puis sont venues les réalisations des captations intégrales de chaque nouvelle pièce, pour les besoins de promotion des créations.
La captation de Solides, créée en 2004, fut réalisé en deux jours, avec un découpage plus cinématographique. Ces travaux de réalisation m’ont permis d’appréhender pièce après pièce toute l’exigence de création de Catherine Diverrès. Fasciné par cette forme d’expression et par sa puissance, impressionné par le travail déployé pendant des semaines, des mois, par l’engagement personnel que cela demande à tous, j’ai réfléchi à la manière de rendre cela perceptible au travers d’un film. Qui est Catherine Diverrès ? Comment définit-elle la fonction de chorégraphe dans le cadre de l’institution qu’elle dirige avec les engagements que cela implique ?
Hervé Portanguen
KAZUO OHNO
KAZUO OHNO

Un mot sur Kazuo Ohno, auquel est consacré une belle séquence d’archives dans Vous dansez ? Catherine Diverrès. Ohno est l’un des grands pionniers du butō, une forme de danse japonaise d’avant-garde, un soliste légendaire qui a profondément inspiré Catherine Diverrès (comme il avait d’ailleurs marqué Pina Bausch).
Kazuo Ohno a été révélé au monde à la fin des années 70, par son œuvre Admiring La Argentina, un solo réglé sur une partition mixte combinant flamenco, Bach et castagnettes argentines, et utilise un vocabulaire d’une simplicité trompeuse. Drapé dans une robe féminine et son visage peint en blanc, on aurait pu le prendre pour un travesti ; mais le sérieux de ses intentions, sa sensibilité et son merveilleux sens du théâtre ont été universellement acclamés. Il a continué à se produire à plus de quatre-vingt-dix ans, son corps affaibli et usé, et est resté jusqu’à la fin de sa vie (105 ans) un professeur inspirant et apprécié, qui débutait ses classes par des considérations philosophiques.
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