Roxane

Guillaume de Tonquédec et Roxane

L’industrialisation de l’agriculture reste un marqueur important de la transformation de notre société. Dans son film Roxane , qui sort en salles, Mélanie Auffret prend à rebours la vision technocratique de l'élevage intensif où l’animal est vu à travers le prisme de la rentabilité. Son héros, Raymond, s’adresse à ses pondeuses considérant qu’il existe entre eux un commerce équitable : des œufs contre la vie au grand air. Il leur parle, leur déclame des vers d’Edmond Rostand, trouvant là un auditoire qui ne manque pas de répondant.

Mine de rien, cette comédie sans prétention porte en elle des germes de révolution : les animaux auraient non seulement le droit de ne pas être inutilement maltraités, mais aussi celui d’accéder à la culture, de se syndiquer et d’organiser des grèves quand ces droits sont menacés !

ROXANE

de Mélanie Auffret (2019)

Toujours accompagné de sa fidèle poule Roxane, Raymond, petit producteur d’œufs bio en Centre Bretagne a un secret bien gardé pour rendre ses poules heureuses : leur déclamer les tirades de Cyrano de Bergerac. Mais face à la pression et aux prix imbattables des grands concurrents industriels, sa petite exploitation est menacée. Il va avoir une idée aussi folle qu’incroyable pour tenter de sauver sa ferme, sa famille et son couple : faire le buzz sur Internet.

>>> un film produit par Quad Films

ORIGINE

SOIS HEUREUSE MA POULE

Juin 2016, une loi est votée : toutes les petites fermes ont l’obligation de passer à l’élevage industriel. Dure nouvelle pour Raymond, qui se doit de l’annoncer à ses poules.

Ce court-métrage réalisé en juin 2016 est en quelque sorte la première pierre de Roxane pour Mélanie Auffret.

ENTRETIEN

MÉLANIE AUFFRET

Mélanie Auffret

D’où venez-vous, Mélanie Auffret ?

Je suis originaire de Vannes, mes grands-parents étaient agriculteurs et avaient une exploitation de vaches laitières du côté de Corlay (22) où j’ai passé l’essentiel de mon temps libre. Quand je suis montée à Paris, à 20 ans, je me suis inscrite dans une école de cinéma. J’ai fait de nombreux stages, à la régie ou en tant qu’assistante sur des tournages et j’ai réalisé deux courts métrages. Mon deuxième, c'était Sois heureuse ma poule, situé dans le même univers que celui de Roxane, une production familiale à 1000 €, interprétée par de vrais agriculteurs. Ce film a été présenté au Festival de L’Alpe d’Huez en 2017 où le producteur Foucauld Barré (Quad) m’a proposé de développer un long métrage à partir de cette idée. Pour moi, la jeune bretonne sans aucune connexion, c’était incroyable.

Comment vous est venue l’idée de ce long métrage ?

Quand mon producteur m’a appelée pour me demander si j’avais une idée de long métrage, j’avoue que je n’en avais pas encore ! J’ai donc retardé au maximum


la date de notre rendez-vous et je suis repartie passer du temps chez moi, dans les fermes du Centre Bretagne, car je savais que je trouverais l’inspiration au contact du terrain. Un matin, j’étais à la traite avec un éleveur du coin. Comme beaucoup d’agriculteurs, il est assez taiseux, mais il finit par me confier qu’il avait souvent récité des textes de théâtre à ses vaches pendant la traite. Il avait arrêté l’école trop tôt pour y découvrir les grands auteurs et ce plaisir secret était pour lui une façon de combler sa frustration. J’ai trouvé l’anecdote si jolie qu’elle a immédiatement fait naître l’idée de Roxane. Ce qui est drôle, c’est qu’en racontant le scénario à sa femme sans lui dire qui me l’avait soufflé, elle s’est exclamée : incroyable, il n’y a que le cinéma pour inventer des choses pareilles !

Avez-vous écrit le scénario toute seule ?

Non, j’ai travaillé avec Michaël Souhaité. C’était formidable de pouvoir s’appuyer sur son expérience de la structure du long métrage. Et pour qu’il puisse s’immerger, nous sommes partis à Corlay à la rencontre des gens du coin et des décors qui ont inspiré le film.

Avec cette histoire, quel message aviez-vous envie de faire passer ?

Mon but était avant tout de raconter l’histoire d’un homme qui est sur le point de perdre son exploitation mais qui ne se résigne pas et tente de se faire entendre de manière différente, de changer le cours des choses, à sa façon. Raymond est un personnage romantique, et c’est grâce à sa passion pour le théâtre et celle des grands textes qu’il va réussir à fédérer autour de lui et s’en sortir. Cette histoire me permettait aussi de mettre en image la magnifique relation que tissent ces paysans avec leurs bêtes. Chaque agriculteur est toujours accompagné de son animal de compagnie, généralement un chien. Moi, cela m’amusait de décaler ce binôme en faisant de Roxane la poule domestique de Raymond. Et puis les gallinacées sont de magnifiques actrices ! Elles ont un potentiel comique énorme à travers leurs réactions, leurs caquètements et leurs yeux capables de friser à tout moment. C’est donc logiquement qu’à travers Roxane, elles sont devenues les personnages incontournables de cette histoire.
Mais au-delà de ce décor et de ce contexte, c’est surtout une histoire humaine que j’avais envie de raconter. Une histoire d’amour entre Raymond et sa femme, une histoire de couple qui doit faire face à des difficultés sans précédent et qui va malgré tout s’unir pour surmonter les obstacles économiques et financiers du monde agricole d’aujourd’hui.
Si le film est, je l’espère, ancré dans son temps et son époque, il parle avant tout d’amour. L’amour du théâtre évidemment, mais aussi l’amour des autres, de réconciliation et de vivre ensemble.

Avez-vous su très vite que Guillaume de Tonquédec serait votre Raymond Leroux ?

Guillaume est un acteur que j’adore depuis toujours et j’avais énormément envie de travailler avec lui. Même s’il n’était pas forcément le plus évident dans la peau d’un agriculteur, j’ai été totalement séduite par la manière dont il avait appréhendé le rôle de Raymond à la lecture du scénario. Et mon coup de cœur pour lui fut tel que je n’ai pas voulu voir d’autres comédiens. Guillaume a cette tendresse et cette bienveillance qui était nécessaire au personnage de Raymond. Dans cette histoire, notre héros s’embarque dans une aventure que personne autour de lui ne comprend. J’avais donc besoin d’un acteur immédiatement sympathique auquel on pouvait s’attacher tout de suite.

Au sens propre comme au figuré, il montre ici un visage différent. Comment avez-vous travaillé ?

Pour l’aider à se glisser dans son personnage, je l’ai emmené à la ferme où il a effectué un stage agricole pendant quelques jours. Il a participé au ramassage des œufs, a beaucoup discuté avec les agriculteurs du village, est venu boire la poire chez Hubert… C’est à ce moment-là que j’ai retrouvé chez lui les personnes que je côtoyais pendant toute mon enfance et mon adolescence. C’est à dire quelqu’un d’authentique.
Par ailleurs, je lui ai demandé de prendre quelques kilos et de garder les cheveux un peu longs. Après quoi nous lui avons mis les sourcils en bataille et, pour la première fois, il s’est laissé pousser la moustache ainsi qu’une barbe de trois jours, un peu négligée. Cette moustache fonctionne bien car, en effet, ça lui donne un nouveau visage. Je voulais aussi qu’il ait la peau burinée de ceux qui travaillent dehors et la maquilleuse a peint des petits vaisseaux éclatés sur ses joues. C’est tous ces petits détails qui ont fait naître Raymond Leroux et qui ont permis à Guillaume de s’approprier son personnage.

En quoi Léa Drucker était l’actrice idéale pour incarner Anne-Marie, son épouse ?

C’est une comédienne que j’avais beaucoup aimée au théâtre dans Lucide de Rafael Spregelburd et au cinéma dans Jusqu’à la garde de Xavier Legrand dont j’avais vu le court métrage. J’étais ravie qu’elle accepte ma proposition. Elle m’a beaucoup aidée à affiner le portrait d’Anne-Marie. Grâce à elle, son personnage a vraiment gagné en profondeur. Par ailleurs, elle connait Guillaume de Tonquédec et Lionel Abelanski depuis 25 ans. Leur amitié dans la vraie vie m’a permis de très rapidement créer cette famille à l’écran.

Qui est cette femme optimiste et bienveillante, qu’elle incarne ?

Anne-Marie est une femme impliquée dans son travail à la banque et présente pour sa famille. C’est elle qui porte la culotte et en même temps elle reste attentive aux autres. Elle se raconte à travers de nombreux petits détails. Ses vêtements sont bien choisis, impeccablement repassés mais ils ne datent pas de la dernière mode car c’est une femme qui préfère dépenser pour le bonheur de sa famille. Elle est toujours bien coiffée mais peu maquillée. En fait, elle ressemble aux femmes de mon quotidien, quand je vais chez mes parents ou mes grands-parents.

C’est dans les yeux d’Anne-Marie, notamment, qu’on peut lire la peur du qu’en-dira-t-on. Comment expliquez-vous que cette femme forte y soit sensible ?

En construisant le personnage d’Anne-Marie, je me suis raconté qu’elle était née à Corlay et fréquentait ses voisins dès l’école primaire. Or, quand on passe toute sa vie dans le même village, ce qu’on peut raconter sur vous, la réputation qu’on se fait, c’est important.

Qui est Poupou qu’incarne Lionel Abelanski ?

Il est inspiré de personnages que l’on trouve dans tous les petits villages de campagne. Il vit en autarcie dans sa ferme, entouré de ses bêtes. Chez lui, il n’occupe qu’une pièce où tout est réuni autour d’un poêle : le lit, la table à manger, la radio et l’évier. Lionel a totalement saisi le personnage. J’ai toujours aimé ce comédien et c’est sa complicité avec Guillaume qui a rendu le duo évident. Comme ils sont amis depuis des années, l’alchimie était parfaite.

Comment vous est venue l’idée du personnage de Wendy ?

Wendy fait partie de ces nombreux anglais qui viennent s’installer dans la campagne bretonne pour les prix attractifs de l’immobilier et la belle météo. Dans l’univers de Raymond, Wendy dénote par son excentricité et apporte une bouffée d’air frais. Sa passion des mots, du théâtre, est communicative. Grâce à elle, notre agriculteur taiseux va s’ouvrir aux autres. Comme Raymond le dit si bien, elle est cette anglaise qui lui a appris le français. J’ai adoré travailler avec Kate qui a apporté avec elle ce mélange d’excentricité et de flegme très anglais. Aux côtés de Guillaume, cette touche anglo-saxonne était détonante !

Et ce personnage de tante Simone, qu’interprète Liliane Rovère ?

Tante Simone, c’est un peu la grand-mère que tout le monde connaît ! C’est une inconditionnelle de Plus belle la vie et elle rapproche tout ce qui lui arrive à des épisodes de la série. C’est une femme qui a traversé les temps et les époques et pourtant, c’est elle qui glisse l’idée la plus moderne à Raymond. Celle de faire le buzz et de profiter des opportunités offertes par les réseaux sociaux pour faire entendre sa voix. C’est d’ailleurs une thématique qui m’intéressait particulièrement dans cette histoire. Montrer des agriculteurs, ancrés dans leur temps et surtout, connectés.

Comment la jeune réalisatrice que vous êtes a travaillé avec tous ces grands acteurs sur le plateau ?

J’avoue que j’étais très intimidée en amont du tournage mais ça s’est remarquablement bien passé ! J’avais rêvé mon histoire, travaillé l’écriture et le découpage pendant des semaines, j’avais en tête la mélodie des répliques, les silences, etc. Tout le monde a été totalement réceptif et immédiatement, l’appréhension que j’avais au départ a complètement disparu pour laisser place à un plaisir immense.

Saviez-vous aussi bien ce que vous vouliez pour l’image ?

J’avais une idée très précise des décors, des costumes, des lieux dans lesquels l’action se déroulait. Je voulais absolument tourner chez moi, à Corlay, sur les terres qui ont nourri l’histoire pendant toute la durée de l’écriture. Par exemple, on est allé tourner dans le vrai bar chez Hubert et évidemment, dans une vraie exploitation de poules pondeuses. C’était très important pour moi de tourner dans des endroits authentiques et avec mon producteur, on s’est dit qu’il n’y avait pas meilleur endroit pour le film que de tourner là où tout avait commencé. Par ailleurs, avec Nicolas Massart, le chef opérateur du film, nous avons cherché à retrouver les belles lueurs d’été de la campagne française, à sublimer ces paysages colorés et éclatants. J’avais à cœur de filmer la campagne qui m’a apporté tant d’émotions dans ma jeunesse, et qui continue à le faire d’ailleurs.

Y a-t-il eu un traitement spécial pour la poule qui campe Roxane ?

Elles étaient onze à se partager le rôle. Il y avait la poule suiveuse qui marchait dans les pas de Guillaume, la poule voiture qui s’installait à ses côtés devant le pare-brise, la poule épaule qui montait sur lui, celle qui a eu droit à un costume noir pour se présenter dans Le corbeau et le renard, celle qui était habituée à jouer avec Bill, le chien… et Roxanette, la préférée de Guillaume. On l’utilisait pour les scènes avec les enfants car elle se laissait attraper facilement et était particulièrement douce et gentille.

Comment décroche-t-on Gaëtan Roussel pour la musique ?

C’est la classe, non ? Je suis fan de sa musique et comme mes producteurs le connaissaient, ils lui ont envoyé le scénario. Finalement, ça s’est fait assez naturellement car il a accepté rapidement.
Ayant pris l’habitude de mettre de la musique sur le plateau, je lui ai envoyé une liste de références que j’avais en tête et il se trouve que nous avions souvent les mêmes. Il m’a offert mille fois plus que ce que j’aurais osé espérer. Au final, je dois dire que j’ai eu beaucoup de chance car tous les gens qui ont participé à mon film ont eu un coup de cœur pour cette histoire de poules et l’aventure vers laquelle je voulais aller.

RENCONTRE

GUILLAUME DE TONQUÉDEC

Guillaume De Tonquédec au milieu de ses poules

Qu’est-ce qui vous a intéressé dans ce projet ?

C’est toujours excitant de lire le scénario d’un premier film, surtout quand il est écrit de la main du réalisateur, ici une femme, jeune, culottée, dynamique… et bretonne ! Il n’en fallait pas plus pour me séduire.

En quoi l’histoire qu’elle voulait raconter vous touchait ?

C’est un conte poétique. Cet homme taiseux qui vibre en secret pour la littérature est émouvant. C’est un homme plus à l’aise avec ses animaux qu’avec l’espèce humaine. Raymond a cette passion secrète, il a besoin de déclamer des vers mais il s’adresse à ses poules car il sait qu’elles seules ne le jugeront pas. Ce complexe lié au fait qu’il n’a pas fait d’études, ce sentiment de ne pas être légitime face à la culture, c’est touchant mais quand on sait que cette démarche est inspirée d’une histoire vraie, cela devient bouleversant.
Au début, Raymond cache cette passion comme on cacherait une maîtresse ! L’idée de lui faire faire son coming-out littéraire m’a paru à la fois très drôle et très émouvante car cela devient un parcours initiatique. Pour sauver son exploitation, il devra se mettre à nu, au sens fort du terme : face à sa femme, ses enfants, ses amis, son entourage professionnel, et même le monde entier puisqu’il va passer sur YouTube! Il va s’en trouver changé car en assumant son amour du théâtre, il s’acceptera lui-même. C’est là où le film atteint une dimension universelle car tout le monde peut s’identifier à cet homme qui va se battre pour sauver ceux qu’il aime.


En quoi ce personnage intéressait l’acteur que vous êtes ?

Ayant eu pas mal de difficultés à apprendre à lire et à écrire, j’ai moi-même eu un accès laborieux à la littérature. J’étais donc touché par la résonance entre le personnage et moi. Et puis avec ce film, il y avait beaucoup de défis à relever. Tout d’abord, je ne savais pas comment allait travailler Mélanie : comme nous n’avions aucune référence, il fallait fonctionner à l’instinct et au coup de cœur. Ensuite, je devais jouer avec une poule et je savais que contrairement à un acteur, un animal est toujours juste donc il faudrait se débrouiller pour être bon en même temps qu’elle ! Enfin, sur le papier, ce personnage était dessiné de nombreuses couleurs et c’était l’occasion de montrer un visage différent, d’aborder des choses nouvelles dans l’émotion ou la naïveté.

Avez-vous dû aller chercher votre ruralité pour incarner cet agriculteur ?

C’était un des challenges car à force d’incarner des personnages citadins, j’étais conscient d’avoir l’étiquette de l’acteur parisien. Ce n’est pas comme ça que je me vois mais je savais qu’il faudrait lutter contre les a priori et l’image que je peux dégager. Cela fait partie du métier et j’étais d’autant plus content de me lancer ce défi qu’au fond de moi, je savais que c’était possible. Pour éviter que l’on dise Ah c’est Guillaume de Tonquédec déguisé en agriculteur, il fallait être crédible dès la première image, que le côté paysan soit tangible et qu’on puisse le ressentir à l’écran. Le spectateur devait être embarqué par le personnage et non pas par un acteur qui fait une composition.

Cela commence par le look. Comment avez-vous travaillé celui de Raymond ?

Mélanie m’avait demandé de prendre un peu de poids, ou en tout cas de ne pas en perdre, ce qui était plutôt intéressant pour le personnage. Pour arrondir davantage mon visage, Noa Yehonatan, la coiffeuse, a travaillé sur ma pilosité : une coupe de cheveux un peu longue, une barbe de quelques jours et une moustache. Concernant le maquillage, Suzel Bertrand a fait le contraire de d’habitude puisqu’au lieu de masquer les défauts de la peau, elle les a accentués. Pour montrer que cet homme travaille dehors toute l’année, elle a évité le fond de teint, fait ressortir mes traits de fatigue et accentué mes rougeurs. Par ailleurs, mes ongles devaient être sales et on a un peu bruni mes mains pour montrer qu’elles avaient souvent pris le soleil et travaillé la terre. En ce qui concerne le costume, nous trouvions intéressant de faire de la combinaison de travail le seul costume de Raymond. Ajoutée aux bottes qui imposent une démarche lente, lourde, ancrée dans le sol, elle me donnait un côté très terrien.
Ce costume n’est pas anodin, c’est pourquoi le film s’ouvre sur cette scène où l’on voit Raymond se préparer en enfilant sa combinaison et en passant ses bottes. C’est le rituel par lequel il commence sa journée depuis qu’il a repris l’exploitation de ses parents, à 16 ans. Finalement, les rares fois où il ne porte pas ce bleu de travail, cela marque un moment important. Il y a par exemple ce rendez-vous à la banque où il doit réclamer un prêt auprès de sa propre femme : avec sa petite veste et sa chemise, tout à coup, il bascule dans un autre univers et devient presque un autre homme. Tout cela aide énormément car une fois que tout est défini, il n’y a plus qu’à entrer dans le costume de son personnage et à dire ses mots. Le corps, la voix se mettent alors en place presque naturellement.

Vous avez également effectué un stage agricole pour vous préparer. Qu’y avez-vous appris ?

Pendant cette semaine de stage intensif, j’ai appris certains gestes, notamment avec les bêtes. Dès le premier soir, quelques heures après ma descente du train, j’ai été réquisitionné pour participer à un départ de poules : j’ai enfilé une combinaison et tenté d’attraper des poules pour les mettre dans des cages et charger les camions. J’ai tout de suite aimé cela. Cela m’a permis de sentir physiquement et charnellement les choses. Mais au contact des agriculteurs, avec qui j’ai pu parler de tout et de rien, j’ai surtout compris des choses sur ces hommes et ces femmes entièrement dévoués à leurs exploitations qui ne connaissent ni les vacances ni les week-ends. En tant que citadin, je n’avais pas saisi l’attachement qu’ils ont pour leur terre et l’amour qu’ils ont pour leurs animaux. J’ai aussi mieux compris le désespoir dans lequel ils peuvent se retrouver quand leur exploitation est en péril car en perdant leur ferme, ils perdent tout : leur travail, leur héritage et leur raison de vivre. À une époque où l’on déplore souvent la perte de valeurs et de repères, ces gens-là ont beaucoup à nous apprendre.

Les agriculteurs se livraient-ils facilement avec vous ?

Il y a une pudeur chez les bretons que je connais bien : ils sont instinctifs et s’ils ne vous sentent pas, ils ne se livreront jamais. Mais dans le cas contraire, ce sont des gens qui ne manqueront pas de vous aider. C’est ce qui s’est passé, avec moi, mais aussi avec toute l’équipe car beaucoup ont mis la main à la pâte pour faire exister ce projet. Que ce soit pour trouver des décors, amener des animaux, etc. Mélanie étant une enfant du pays, ils voulaient l’aider à décrire le plus fidèlement possible ce milieu d’où elle vient.

Comment s’est passée votre collaboration avec Léa Drucker ?

Je connais Léa depuis mon premier film,Tableau d’honneur, de Charles Nemes, en 1992, car elle y jouait mon amoureuse ! Et juste avant Roxane, nous nous sommes retrouvés sur les planches pour jouer La vraie vie, la pièce de Fabrice Roger-Lacan. Venant tous les deux du théâtre, nous partageons le même goût du travail autour du personnage, de l’écriture, des mots, et avons développé la même exigence. Dans le couple que nous formons ici, c’est elle qui porte la culotte. Elle est la plus forte des deux et soutient son mari car elle comprend bien qu’il est en train de perdre son exploitation et perdre pied. On sent qu’il y a de l’amour entre eux, un lien très fort à la famille, aux enfants, à la transmission, mais ils ne sont pas dans la démonstration. Pour trouver le ton juste, nous avons beaucoup discuté avec Léa, nous demandant s’ils se prenaient parfois dans les bras ou s’embrassaient devant les enfants. Il y a de toute façon beaucoup de pudeur entre eux, une pudeur paysanne mêlée au secret.

Vous connaissez aussi Lionel Abelanski depuis des années. En quoi votre amitié était-elle un atout ?

Notre amitié, notre respect et notre admiration mutuels nous ont aidé à jouer le compagnonnage amical, fraternel entre Raymond et son beau-frère Poupou. Nous nous connaissons depuis le Cours Florent, nous avions joué ensemble au théâtre dans Un Dîner d’adieu et, dans ce film, il est particulièrement bluffant. Dans le rôle de Poupou, je le trouve plus touchant, authentique et drôle que jamais. Il y a quelque chose de très sincère dans ce qu’il raconte ici.

Vous partagez néanmoins la plupart de vos scènes avec une poule. Quel lien peut-on avoir avec un partenaire de ce genre ?

N’ayant d’autre choix que de bien m’entendre avec mes partenaires à plumes, le stage agricole a été essentiel car il m’a appris à approcher une poule, à la prendre dans mes bras et à lui parler sereinement. On ne peut pas tricher avec un animal. Pour les scènes où il y avait six ou sept mille poules, il ne fallait pas faire n’importe quoi : on devait les respecter, ne pas les effrayer et se mettre à leur rythme. Comme elles ne pouvaient pas tourner trop longtemps et à des heures trop chaudes, on les a beaucoup ménagées en construisant le plan de travail en fonction d’elles.
Manuel Senra avait dressé onze poules de manière différentes. J’avais ma préférée - une gentille et douce que je reconnaissais entre toutes – mais avec chacune d’elle il a fait un travail remarquable car certains gestes apparemment simples tel que demander à la poule de vous suivre comme un chien sont extrêmement difficiles à effectuer. Or il fallait que je la fasse grimper dans la voiture, qu’elle accepte de rester dans mes bras, que je lui parle, que je lui lise des textes… Pour tout cela, nous devions nous apprivoiser mutuellement. C’est pourquoi j’ai passé beaucoup de temps avec elles aux essais et je les gardais volontiers entre les prises pour tisser du lien. Être en symbiose avec elles m’aidait pour rentrer dans le personnage et dans l’histoire.

Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?

J’ai adoré l’idée qu’on ne puisse jamais tout maîtriser face à ces partenaires à plumes. Comme avec les enfants, si vous ne parlez pas vraiment à une poule, elle ne vous répond pas. On est condamné à n’avoir que des moments de grâce avec les animaux. Cela oblige le comédien à être dans la vérité, à jouer les scènes en étant 100% engagé, à se mettre à disposition et à laisser la magie opérer. Il ne faut pas chercher à provoquer car si on force les choses, c’est comme en amour ou en amitié, ça ne marche pas.
J’ai beaucoup appris en travaillant avec les poules parce que ça remet les choses à leur place, comme elles devraient toujours être. Être humble, disponible et à l’écoute comme on devrait l’être constamment avec son partenaire. Et lorsqu’on est juste, lorsqu’on atteint une certaine vérité, intuitivement, on le sait.

ENTRETIEN

LÉA DRUCKER

Léa Drucker

Qu’est-ce qui vous a intéressé dans ce projet ?

J’aimais l’idée principale que ce scénario abordait, celle d’un homme qui a du mal à communiquer avec sa famille et n’arrive à s'exprimer qu’avec une de ses poules. Je trouvais que c’était un point de départ audacieux qui relevait presque du pari. Cette problématique sur les mots, sur le théâtre me plaisait énormément bien sûr, et la façon dont Mélanie racontait cette histoire était très sensible. La poésie, aujourd’hui, a de moins en moins de place dans nos quotidiens et cela semble compliqué de dire je veux être un poète. Surtout dans le milieu agricole où l’on n’a pas le temps d’avoir des états d’âme et où l’on peut souffrir physiquement et psychologiquement. Mais à bien y réfléchir, c’est un sujet universel car nombre de gens peuvent se heurter à des problèmes de communication et pour leur famille c’est toujours dur.


Par ailleurs, le personnage d’Anne-Marie me plaisait car, contrairement à Raymond, elle est dans la réalité. Elle travaille à la banque et chaque jour, elle est confrontée à la mise en faillite d’exploitations, alors quand son mari se demande comment il peut poursuivre son rêve, elle lui dit que ce qu’il tente de faire est un peu utopique et elle essaye de le ramener à la réalité. Malgré tout, elle ne doit pas passer pour une rabat-joie, le challenge était de ne pas la rendre désagréable. Lors des lectures, nous avons beaucoup discuté de cela avec Mélanie et son coscénariste Michaël Souhaité. À cause de cela, on savait tous que le rôle d’Anne-Marie était un peu casse-gueule. C’est pourquoi je voulais qu’elle ait sa propre histoire et ses problématiques. C’était important pour moi mais aussi pour Guillaume et pour le couple. Ayant la chance de partager la vie d’un scénariste-réalisateur, Julien Rambaldi, j’ai pu façonner mon personnage en jouant des séquences avec lui et en lui demandant son avis. Et quand j’apportais à Mélanie et Michaël le fruit de ce que nous avions fait à la maison, ils étaient toujours à l’écoute, et très ouverts pour retravailler derrière.

Quels étaient vos principaux axes de réflexion ?

Nous parlions beaucoup du couple et on voulait montrer ses difficultés sans tomber dans la caricature. Entre Raymond et Anne-Marie, il y a de l’amour, un lien fort qui les unit depuis leur tendre jeunesse et ils ont sûrement fait front sur beaucoup de choses ensemble. Mais au moment où on les rencontre, ils sont en faillite, il faut sauver la ferme et elle sait que ses rêves à lui ne vont pas les aider à résoudre leurs problèmes. Cela crée un fossé, une incompréhension mutuelle et dans ces moments difficiles, ils doivent faire des choix.
Il ne s’agissait pas de raconter quelque chose de plombant mais les bonnes comédies sont celles qui s’incarnent dans une réalité, dans quelque chose auquel on croit et qui est universel pour que chacun puisse s’identifier. C’est ce que font très bien les Anglais : ils nous racontent des histoires du quotidien et parviennent à nous faire rire et à nous faire pleurer en même temps.

Mélanie vous a-t-elle dit que le personnage d’Anne-Marie était inspiré de sa propre mère ?

Pas du tout. J’ai rencontré sa mère bien plus tard et même si Mélanie avait en tête une image bien précise de ce personnage, elle a eu l’intelligence de me laisser imaginer les choses.

Comment avez-vous façonné le look d’Anne-Marie ?

Avec la costumière, nous avons cherché à quoi elle pourrait ressembler. On a réfléchi à la façon dont pouvait s’habiller cette mère de famille qui partage son temps entre l’exploitation agricole où elle vit et la banque où elle travaille. Pour la rendre sympathique, malgré son statut raisonnable, je tenais à ce qu’elle ait une petite fantaisie. Être solide ne devait pas dire rigide. Et cette volonté passait aussi par les accessoires. Ainsi, cette maman, chaleureuse, aimante et solide prépare des Tupperware pour tout le monde et met des petites barrettes colorées. Pour la créer, je me suis beaucoup inspirée des films anglais comme The full monty, car les femmes y sont réalistes, très vivantes, elles ont du panache et de l’enthousiasme, et même quand elles engueulent leurs maris, on ne peut pas s’empêcher de les aimer.

Qu’est-ce que ce rôle pouvait vous apporter en tant que femme et en tant qu’actrice ?

En tant que femme, j’ai découvert qu’on pouvait être dans une certaine dévotion vis-à-vis de sa famille sans pour autant être quelqu’un de soumis. Anne-Marie se lève le matin pour s’occuper de tout le monde, elle est à l’écoute mais elle reste une femme de caractère. Avec son mari, elle forme un couple assez fusionnel et le fait qu’il ne lui dise pas tout crée chez elle une frustration. Ça m’intéressait de raconter qu’on peut avoir du tempérament et souffrir d’un manque de communication. Et en tant que comédienne, j’étais heureuse de pouvoir redécouvrir Guillaume de Tonquédec. Nous avions déjà formé un couple au théâtre – ce qui nous avait permis de créer une complicité utile – mais c’était un tout autre univers : nos personnages étaient des bourgeois parisiens, elle était psy et lui réalisait des documentaires animaliers. Là tout d’un coup, nous basculions dans le milieu agricole, et nous devions être mari et femme dans un autre contexte avec d’autres difficultés. Nous devions rester nous-même, nous servir de notre complicité mais nous glisser ensemble dans une autre vie faite de contraintes physiques, de journées extrêmement longues, d’angoisses matérielles et de préoccupations beaucoup plus lourdes que celles qu’on avait traversées avant.

Avez-vous dû perdre certaines habitudes prises avec Guillaume ?

Non, il fallait juste se regarder autrement. Nos transformations physiques et les nouvelles problématiques auxquelles nous étions confrontés nous y ont aidés. La question était : qu’est-ce qui se passe quand deux personnes qui se connaissent depuis si longtemps et ont toujours avancé ensemble avec une confiance absolue, tapent dans un rocher comme celui-ci ?

Votre complicité avec Lionel Abelanski vous a-telle autant aidée ?

Absolument. Lionel et moi nous connaissons depuis qu’on a 20 ans. Depuis les cours de théâtre on s’est vu grandir et nos chemins se sont souvent croisés. Ensemble, on a fait Mes amis, de Michel Hazanavicius, des spectacles d’Edouard Baer et un téléfilm très dur qui s’appelait Au nom du fils de Christian Faure où on jouait des religieux intégristes. On a donc joué du drame, de la comédie, et ce n’est pas un hasard, on s’entend bien. Sur le tournage, Guillaume, Lionel et moi partagions le même gîte. Quand on rentrait, il y en avait toujours un qui avait fait des crêpes, alors on ouvrait une bouteille de cidre et on papotait. C’était sympa car j’avais l’impression de revivre une vie d’étudiant.

Certains agriculteurs du coin vous ont donné la réplique. En quoi est-ce intéressant de jouer avec des acteurs amateurs ?

En tant qu’acteur, nous sommes parfois embarqués par nos techniques, nos petites astuces mais eux, leur jeu est très pur. Ils ont juste à être eux-mêmes et à être en confiance avec nous. C’est très inspirant et cette réalité colore le film. Notre grande crainte, à Guillaume et moi, était d’avoir l’air déguisé mais ils ont été de bon conseil et ce qu’ils proposaient était souvent étonnant.

Étiez-vous à l’aise avec les poules ?

Au début, je me sentais un peu godiche pour les attraper et j’étais impressionnée en entrant dans des bâtiments où il y avait des milliers de poules, mais je me suis vite habituée et j’ai appris à travailler avec elles. Il ne fallait pas faire trop de bruit pour ne pas les effrayer car en cas de stress, il peut y avoir des mouvements de poules. Ma grande frustration est de ne pas avoir eu de scènes avec LA poule. J’avais réussi à gratter une petite séquence et j’ai adoré la jouer mais elle a été coupée au montage. Résultat : je n’ai pas de scène avec la star du film. Quand je dis star, ce n’est pas une image car c’était une vraie diva. Elle avait des horaires aménagés, dès qu’elle arrivait sur le plateau, tout le monde faisait le silence…C’était drôle.
J’aime beaucoup travailler au contact de la nature et des animaux car ça nous ramène à quelque chose de très organique mais il faut accepter l’idée que l’animal est roi. C’est lui qui donne le tempo car s’il ne veut pas jouer, on ne le forcera pas. Manu était là pour dresser LA poule, et Jacques toutes les poules figurantes, or il ne fallait pas mêler la poule actrice avec les autres poules car elle se prennent le bec.

Est-ce plus compliqué de jouer avec un animal qu’avec un enfant ?

Avec les deux c’est galère, parce que quoi qu’on fasse c’est eux qui captent l’attention ! En fait ils sont tellement imprévisibles, que ça peut être très difficile mais ça peut aussi créer des choses exceptionnelles. D’une manière générale, j’aime jouer des rôles de maman car cela oblige à rentrer immédiatement dans l’intime. Le petit garçon avec lequel je jouais ici est magnifique et les deux grands sont excellents. J’aime beaucoup ce qui se raconte avec les trois enfants dans cette famille.

Comment était Mélanie avec vous tous sur le plateau ?

Mélanie est une toute jeune femme, très intelligente, très sensible et c’était drôle parce qu’elle a une énergie qui nous dépassait. L’enthousiasme de faire un film, la passion, l’intégrité par rapport à son histoire, la rigueur, le travail… tout cela la rendait vibrante et en même temps très exigeante. Parfois, c’était déconcertant parce qu’elle est têtue et quand elle voulait quelque chose, elle ne le lâchait pas. Mais comme elle a beaucoup d’humour et peut tout entendre, on pouvait tout lui dire. Comme elle savait pertinemment de quoi elle parlait, elle avait peur que ses personnages puissent lui échapper mais nous lui avons fait comprendre qu’il fallait une petite distance aussi pour jouer, pour qu’elle dessine ces personnages et que nous tenions le crayon avec elle. Au final, l’ajustement s’est très bien passé. On a beaucoup ri, c’était passionnant.

REVUE DU WEB

Idée fixe

LE TÉLÉGRAMME >>> Sa belle histoire ne doit rien au hasard, mais plutôt à sa ténacité toute bretonne et à son énergie communicative. Je ne connaissais personne dans le milieu du cinéma. Ma mère est enseignante et mon père travaille dans les assurances ! Le déclic m’est peut-être venu de mon institutrice en primaire à Plescop (56), Bénédicte Babin, qui m’a donné le goût de la poésie.

FRANCE 3 >>> Une comédie sociale, qui nous plonge dans l’univers d’un éleveur de poules... Ce long métrage a été tourné en Centre-Bretagne avec entre autres Guillaume de Tonquédec... C'est lors d'une avant-première, devant des lycéens vannetais, qu'une de nos équipes a rencontré sa réalisatrice bretonne

OUEST FRANCE >>> Je suis adepte des comédies sociales à l’anglaise, où le sujet social est traité avec humour. Grâce à la comédie et avec le rire, le message a beaucoup plus d’impact sur le public. C’est aussi un moyen de montrer qu’il y a des solutions, qu’il faut être optimiste. Aujourd’hui on a besoin de sourire en sortant du cinéma.

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    CRÉDITS

    réalisation Mélanie Auffret
    scénario Mélanie Auffret et Michaël Souhaité
    directeur photo Nicolas Massart
    son Pascal Armant, Matthieu Fichet, Nicolas Dambroise, Bruno Mercère
    directeur de prod Olivier Lagny
    assistant réal Dylan Talleux
    chef déco Thomas Ducos
    costumes Marie-Laure Lasson
    régisseur Thomas De Sambi
    maquillage Suzel Bertrand
    coiffure Noa Yehonatan
    scripte Marion Pastor
    casting Marie-France Michel
    directrice de post-prod Anne-Sophie Dupuch
    montage Jeanne Kef
    musique originale Gaëtan Roussel

    avec Guillaume de Tonquédec, Léa Drucker, Lionel Abelanski, Kate Duchêne, Liliane Rovère, Michel Jonasz, Jean-Yves Lafesse, Baptista Perais, Sacha Bejaoui, Philippine Martinot, Hervé Mahieux, Vinciane Amilhon, Benjamin Ritter, Isabelle Legros, Loïc Legendre et Roxane

    un film produit par Foucauld Barré, Nicolas Duval Adassovsky, QUAD
    en coproduction avec TF1 Studio, France 3 Cinéma, Les Productions Jouror, Section 9, Mitico
    avec la participation de OCS, Ciné+, France Télévisions
    en association avec SG Image 2017
    développé avec le soutien de Cinémage 12 Développement, Indéfilms Initiative 6, A plus Image Développement 7
    avec le soutien de la Région Bretagne, l'Angoa
    distribution Mars Films pour TF1 Studios

    Artistes cités sur cette page

    Mélanie Auffret

    Mélanie Auffret

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