Synaesthesis

Sur la plage rose

Synaesthesis nous plonge instantanément dans un monde parallèle, un peu vaporeux, où le temps et l'espace sont dilatés, à la fois dégradés et upgradés. Ce rapport distancié au réel colle parfaitement à la proposition musicale, balade en apesanteur, paroles susurrées : une réussite.

CLIP

SYNAESTHESIS de David E. Grall

un clip réalisé par David E. Grall (2020 - 4’)

INTENTION

Union des sens

par David E. Grall

Entree grotte filtre violet

Premier morceau qui a accompagné mon retour au solo musical, après plusieurs années de travail en groupe, Synaesthesis est un retour aux sources pour me délester de certains systématismes, tant structurels que sonores, pour me rapprocher d’une forme de minimalisme électro-acoustique, plus propice à la spontanéité de l’écriture.


La base reste inchangée : un rythme, une harmonie et l’élan pulsionnel d’un texte s’écoulant en évidence sur l’instant ; le reflet tangible de ce moment de création.
Quand, dans une soirée de solitude à enregistrer des synthétiseurs, j’entends soudain tout bas au casque à travers la carte son, deux voix brailler dans une langue inconnue entrecoupées de longs soupirs, probablement captées par je ne sais quel magnétisme émanant de mes machines : J’entends murmurer des cris / leur silence indécis / mais ces ondes emmurées / ne parasiteront pas la mienne.
Il s’agit d’une captation, celle d’une succession de phénomènes que la pensée, à travers les mots, vient fixer dans le chant, intrinsèquement tenu et tissé par la cadence harmonique.
Après les arrangements et l'orchestration digitale, j’ai invité Pierre Delestrange à enregistrer quelques ponctuations percussives et un passage de flûte, puis William Bonnet à apposer sa basse le long du morceau, ayant envisagé ce premier titre, à proprement parler, comme un thème. Un genre d’hymne au potentiel de formulation multiple, ouvrant la voie à des expressions scéniques diverses, que ce soit seul aux machines ou accompagné par tout type de formation instrumentale possible.
Synesthésie : du grec Syn (union), et Aesthesis (sensation).
Peu de temps après notre rencontre en Finistère voilà cinq ans, Matthias Germain témoignait son désir de me filmer comme exercice à sa pratique de la caméra. Un matin, il me questionne sur mon rapport à l’écriture et à la composition. Je lui expose mon amour du vertige et les tentatives pour contrecarrer mes propres protocoles tandis que l’œil numérique capture un étrange gortozen (traditionnelle collation bretonne). S’ensuivent de courts plans ponctuant ma trajectoire du jour, faite de déambulations hallucinées sur les falaises, avec un atterrissage au studio de musique. Des années après, je repensais à ce document partiellement perdu, énième égarement digital. Je songeais à cet entretien nébuleux qu’un homme aurait eu avec sa propre présence interne, son djinn, son fantôme, peu importe son nom. Il s’agirait de filmer la trajectoire physique de cette journée d’errance comme le voyage psychique d’un être à la rencontre de sa propre multiplicité. En témoin de lui-même, le confronter à ses indécisions et failles.
L’utilisation de la pellicule est tout de suite apparue évidente comme médium de cette expérimentation visuelle et plastique. La spontanéité matérielle et accidentée de la Super 8 en contrainte de mise en œuvre, celle d’un doublement coloré de l’image en textures liquides, paysages mouvants de la psyché, est inspirée par les transes du personnage de Blast, créé par Manu Larcenet.
La syn-aesthesis, l’union des sensations, envisagée et tentée comme sujet fondamental de l’objet filmé. Le dialogue se tisse ici entre les mots, la silhouette errante et les éclats de viscosités lumineuses. Les chants deviennent couleurs balayées en cordes sur les dunes, jusqu’au dénuement.
D’avantage qu’un vidéo clip, lequel aurait eu pour vocation d’illustrer ce que je savais n’être encore qu’une ébauche, un projet musical en devenir, il s’agissait d’aller au bout de cette tentative avec les contraintes formelles définies ; un court poème d’images, de musique et de mots.

BIOGRAPHIE

David E. Grall

Nicolas Onraed David E Grall
© Nicolas Onraed

Auteur-compositeur-interprète né à Morlaix en 1990. Après des études de théâtre et de philosophie, il passe dix ans entre le Royaume-Uni, l’Amérique du Sud, la Belgique, le Maroc et la France en parcours de formation autonome dédié au réapprentissage des langues et de l’écriture. Après un premier recueil de textes (Les Incantations, 2012) et divers projets musicaux, vidéos et scéniques en groupe, il se lance solo en 2018 avec une mise en orchestration électro-acoustique de ses travaux.
Imbibé de chanson française, anglaise et bretonne depuis l’enfance, nourri aux romantiques du 19e et rompu aux expérimentations électroniques de ces trente dernières années, Grall se situe à cette tri-frontière de la recherche folk, poétique et électronique. En 2020, il enregistre son premier album à paraître au printemps 2021, Lovés de loin.
Parallèlement, il prépare l’édition de son deuxième recueil, Déleste et travaille à l’adaptation de sa pièce de théâtre Tutelle en un scénario long-métrage.
Après ses années de route initiatique, il s’est établi à Douarnenez.

COMMENTAIRES

    CRÉDITS

    réalisation David E. Grall
    cymbale et flûtes Pierre Delestrange
    images et montage Matthias Germain, Samuel Landat

    image, développement et numérisation Théophraste Fléchais, L’Abominable
    mixage Pierre Ströska
    mastering Ralph Durel

    lieu de tournage les Roches Blanches et Cameros, Finistère

    Artistes cités sur cette page

    Nicolas Onraed David E Grall

    David E. Grall

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