Contre l’homophobie

couverture peau d'homme

Manifeste contre l’homophobie aux allures de fable médiévale, Peau d’homme est le fruit de l’ultime collaboration entre Hubert et Zanzim, deux compères que la mort a séparés en 2020, Hubert s’en allant avant même d’avoir vu son 50e printemps.
Si les costumes sont bien d’époque, l’architecture du château est passée au filtre surréaliste de De Chirico, et certaines cases superposent plusieurs instantanés. Une manière un peu espiègle de s’emparer de l’histoire à l’image du stratagème de cette peau d’homme qui permet à une femme d’observer le comportement masculin débarrassée de l’apparence et donc des enjeux de séduction. Cette peau d’homme n’est pas sans évoquer le conte de Perrault Peau d’âne : un subterfuge pour échapper à la domination masculine, version hétérosexuelle.

BD

PEAU D’HOMME

de Hubert et Zanzim

Dans l’Italie de la Renaissance, Bianca, demoiselle de bonne famille, est en âge de se marier. Ses parents lui trouvent un fiancé à leur goût : Giovanni, un riche marchand, jeune et plaisant. Le mariage semble devoir se dérouler sous les meilleurs auspices même si Bianca ne peut cacher sa déception de devoir épouser un homme dont elle ignore tout. Mais c’était sans connaître le secret détenu et légué par les femmes de sa famille depuis des générations : une peau d’homme ! En la revêtant, Bianca devient Lorenzo et bénéficie de tous les attributs d’un jeune homme à la beauté stupéfiante. Elle peut désormais visiter incognito le monde des hommes et apprendre à connaître son fiancé dans son milieu naturel. Mais dans sa peau d’homme, Bianca s’affranchit des limites imposées aux femmes et découvre l’amour et la sexualité.

La morale de la Renaissance agit alors en miroir de celle de notre siècle et pose plusieurs questions : pourquoi les femmes devraient-elles avoir une sexualité différente de celle des hommes ? Pourquoi leur plaisir et leur liberté devraient-ils faire l’objet de mépris et de coercition ? Comment enfin la morale peut-elle être l’instrument d’une domination à la fois sévère et inconsciente ?

>>> un album édité par Glénat


Prix décernés

Prix Ti-Zef au festival de la BD de Brest

Prix RTL

Prix Wolinski-Le Point

Prix Landerneau

Grand prix de la BD 2020 de l'ACBD

Nommé pour le Prix d’Angoulême, le Prix des libraires BD 2021, pour le Prix Fnac-France Inter 2021

LA GENÈSE

Un conte moderne

coffre avec la peau d'homme

par Zanzim

Avec Hubert, nous nous sommes apprivoisés au fur et à mesure de nos collaborations. Complicité, partage et amitié se sont imposés au fil du temps. J’avais dit à Hubert Le jour où tu décideras d’écrire une histoire autobiographique en bande dessinée, je veux que tu me choisisses comme dessinateur. Je souhaitais dessiner une histoire intime qui parlerait de lui, de son adolescence compliquée, de sa période gothique et de son homosexualité. Bref, j’imaginais quelque chose de frontal, une histoire contemporaine où il ne se cacherait pas derrière des costumes d’époque et d’énormes cathédrales.
En 2013, à l’époque des manifestations contre le mariage gay, Hubert m’appelle et me dit : Tu voulais faire une BD qui parle de moi ? Eh bien je suis prêt ! Je vais écrire un brûlot ! Cela va s’appeler : Débaptisez-moi ! Un peu soufflé au téléphone, je découvre un Hubert colérique, apeuré et combatif !


Il m’a fallu quelques temps pour me rendre compte de la hauteur de sa peur et de sa colère. Mais en voyant les manifestants à Paris, j’ai eu l’impression d’être dans le film L’Invasion des profanateurs (1979), où les possédés montrent du doigt les pas comme eux ... J’ai alors voulu relever le défi. Hubert m’envoie ce qu’il a fait mais, pour le coup, je trouve son brûlot un peu trash et trop éloigné de son univers habituel. Un peu plus de fun et de poésie ne seraient pas en trop. Quelques mois plus tard, il revient vers moi et m’annonce qu’il a tout changé et me raconte l’histoire de Peau d’homme.
C’est le coup de cœur ! Je sais qu’on tient un truc ! L’idée d’un conte moderne léger, qui traite de manière subtile la question du genre et de la sexualité, me va à ravir.

Les recherches et le choix du style

Je ne suis pas du tout intervenu dans le scénario, tout était parfait ! Mes recherches se sont orientées principalement sur les personnages et notamment sur Bianca qui devait se métamorphoser en Lorenzo. Il fallait, pour ce personnage dédoublé une proximité physique mais pas reconnaissable, seule la couleur des yeux devait rester la même. Je souhaitais que le style de dessin soit simple et moderne et que la lecture soit aussi limpide que possible. Je voulais que les couleurs soient dans l’air du temps, mais pas trop criardes. Hubert m’a fait confiance sur ce domaine qui lui était pourtant réservé. Concernant les décors je me suis plongé dans l’univers des représentations du Cinquecento, âge d’or de la haute Renaissance en Italie. Hubert m’a fourni une imposante iconographie comprenant des costumes, des tableaux de maîtres, des photographies de l’Italie, des caricatures médiévales, des intérieurs, des jardins, des représentations (faussées) de la perspective, ainsi que tout un dossier de représentation de jeunes éphèbes (C’est de la doc pour Lorenzo, disait-il !) Tout y était !
Comme à chacune de mes bandes dessinées, je m’immerge dans une documentation pour ensuite ne garder que l’essentiel. Pour les décors, je me suis inspiré des tableaux de Giorgio De Chirico. L’utilisation des perspectives axonométriques s’est imposée car elle permettait un sens de narration intéressant (de gauche à droite et de haut en bas). J’ai hérité du savoir-faire en ce domaine de Joost Swarte ou de Pierre Clément (cf. publicité pour Reynolds).
L’ensemble devait être aérien et léger, d’où l’absence de bordure de case. La mise en couleurs des traits du décor permettait de placer celui-ci en arrière-plan et de mettre en avant les personnages. En général je pratique la ligne claire mais décomplexée, avec une fausse naïveté très savante, dixit Hubert.

LA RENCONTRE

Le ping-pong BD

par Zanzim

La première fois que j’ai rencontré Hubert, dans une soirée costumée, pendant nos études aux Beaux-arts d’Angers, il était déguisé en nuage : une énorme boule de coton trônait au-dessus de sa tête et des flocons de neiges en tombaient. J’ai tout de suite saisi l’excentricité d’un personnage haut en couleurs qui ne portait pourtant que du noir. C’est Yoann qui a ensuite permis de nous rencontrer à nouveau après nos études.
Notre première collaboration et première bande dessinée fut Les yeux verts (éditions Carabas). Un cocktail détonant entre mon style d’illustration très naïf et l’univers gothique et onirique d’Hubert. Je me souviens que je ne dessinais pas très bien et que Hubert me portait à bout de bras pour m’aider à esquisser un personnage en trois-quart dos... C’était son premier scénario.


Par la suite, nous avons mis en place une méthode de travail infaillible. D’abord, Hubert me raconte son histoire... Une heure et demie et trois carafes de café plus tard, je lui fais part de mes interrogations, qu’il écoute pour les éclipser en quelques minutes. J’essaye de lui faire enlever le plus de dialogues possible car il est très bavard. J’édulcore en dessin les scènes que je trouve trop trash et accentue celles qui me semblent trop fades. Il imagine les histoires, je les dessine, il redécouvre son histoire avec mes dessins et se dit agréablement trahi. Il les colorise et je redécouvre mon dessin avec ses couleurs splendides. C'est ainsi qu'est né le ping-pong BD.

BIOGRAPHIE

Hubert

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Hubert est né en 1971 à Saint-Renan dans le Finistère. Scénariste et coloriste de renom, on lui doit notamment les séries Le legs de l’alchimiste (dessin de Tanquerelle puis de Bachelier, Glénat), Les yeux verts (dessin de Zanzim, Carabas) ou Miss pas touche (dessin de Kerascoët, Dargaud). Sa série Beauté, éditée chez Dupuis, sélectionnée au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême en 2012, reçoit le Firecracker alternative book award Best graphic novel 2015 aux États-Unis.


Pour la collection 1000 feuilles de Glénat, il publie avec Marie Caillou La chair de l’araignée et La ligne droite, ainsi que le diptyque Ma vie posthume dessiné par Zanzim. Hubert a également supervisé l’ouvrage collectif Les gens normaux chez Casterman. Fin 2014, il publie le remarqué Petit chez Métamorphose et poursuit sa saga des Ogres-Dieux avec Demi-sang et Le grand homme. En 2016, il signe avec Virginie Augustin Monsieur désire ? chez Glénat , puis l’année suivante écrit La nuit mange le jour avec Paul Burckel au dessin. En 2019, il réalise avec Gaëlle Hersent Le boiseleur chez Métamorphose. Il reçoit en 2015 le prestigieux prix Jacques-Lob pour l’ensemble de son œuvre.
Hubert est décédé le 12 février 2020.

BIOGRAPHIE

Zanzim

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Zanzim, de son vrai nom Frédéric Leutelier, est né à Laval le 5 janvier 1972. Il a grandi en Mayenne où il n’y avait pas grand-chose à faire d’autre que de lire des bandes dessinées... et dessiner. Il vit actuellement à Rennes et travaille à l’Atelier Pépé Martini avec une dizaine d’auteurs de BD. Il a participé à Comix 2000, ouvrage collectif paru à l’Association et a publié Les yeux verts, La sirène des pompiers avec Hubert, Tartuffe avec Duval (adaptation de l’œuvre de Molière) et plus récemment Ma vie posthume, toujours avec Hubert.


Il a également collaboré au collectif Les gens normaux, paru dans la collection Écritures de Casterman. En 2015, il se retrouve pour la première fois au scénario et au dessin avec L’île aux femmes. Publié dans la collection 1000 feuilles, l’album raconte les truculentes pérégrinations d’un séducteur, as de la voltige, qui se retrouve prisonnier d’une île écartée du monde et peuplée de femmes.

REVUE DU WEB

Manifeste anti-homophobie

ACTUA BD >>> Hubert Boulard, personnalité BD de l’année 2020. Pourquoi lui ? Parce qu’il est caractéristique de cette année qui a fauché tant de talents et parce qu’il avait seulement 49 ans. Parce que son talent nous manque à tous. Nous lui avons rendu un hommage tout particulier dans nos pages.

FRANCE INTER >>> Comment j’ai dessiné Peau d’homme, la leçon de dessin de Zanzim

ATLANTICO >>> La force de cette histoire est de ne pas être pontifiante ou trop moralisatrice. À mi-chemin entre la fable sociale et la farce satirique, elle nous livre, avec légèreté, une jolie leçon de tolérance aux accents extrêmement modernes.

LIVRES HEBDO >>> Avec Peau d’homme, le scénariste Hubert, récemment décédé et le dessinateur Zanzim, ont imaginé un conte malin et moderne, qui se joue des clichés et résonne habilement avec notre siècle. Très fluide, l’aventure se fait tantôt légère, tantôt profonde et bénéficie d’un trait souple et élégant, à la grande lisibilité indique l'Association des critiques de bande dessinée.

COMMENTAIRES

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