Pensées buissonnières

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Avec La Plage des sentiments, Corentin Pichon fait un état des lieux de ce que la fréquentation des plages révèle de notre manière d’être au monde. En se campant sur deux sites, dans les Côtes d’Armor et dans le Morbihan, il observe le théâtre social qui se joue sur un lit de sable. Une succession de portraits sensibles nourrissent la réflexion, de la futilité vers la profondeur, de la joie simple à la mélancolie. Chacun.e se confie en voix-off sur ce qu’il ou elle éprouve ici : affronter le ridicule d’être en slip dehors, rêvasser, faire le point sur soi avant la reprise de septembre, songer à la fragilité et à la beauté de la vie… Tout sauf l’oisiveté apparente au premier coup d’œil.

FILM

LA PLAGE DES SENTIMENTS

de Corentin Pichon (2021 - 26’)

Sur le sable, dans l’eau, les premiers émois, les corps qui se dénudent, qui se libèrent, qui s’exposent. Depuis toujours, la plage est un théâtre où femmes et hommes jouent à ressentir, à imaginer, à s’inventer des rôles. Face à l’étendue des plages, c’est la comédie humaine qui se joue devant nous, et nous sommes tous ici des regardeurs regardés.

>>> un film produit par Aligal production

INTENTION

Un joyau pour raconter le monde

Deux femmes allongées sur la plage - La plage des sentiments

par Corentin Pichon

J’ai imaginé ce film à la fin de l’été, et il y avait encore tout l’automne puis l’hiver à traverser avant le retour si inspirant des corps dénudés sur la plage... Mais l’épidémie du Covid est arrivée. Me vint alors une certitude, du moins une croyance : un réalisateur de films se doit de composer avec le réel inattendu et impermanent. La plage et ses histoires de sentiments et de corps libérés sont éternelles. Or, cet été 2020 était unique dans nos vies, il aurait été dommage que je ne puisse pas le saisir et ainsi raconter son histoire un tant soit peu romanesque.


Je suis fasciné par les corps dans la lumière d’été au bord de la mer. Je tiens rarement en place dans bon nombre de circonstances ; en revanche, mettez-moi assis sur une plage, sans livre, et mon imaginaire galopant m’emmène très loin : j’ai de la tendresse pour ce vieux don Juan à gauche avec sa moustache visiblement en manque d’amour. Je m’inquiète pour ce couple qui ne s’est rien dit depuis tout à l’heure. Là-bas, de toute évidence, cet Aldo Maccione va se prendre une veste ; et puis il y a cette jeune fille émouvante qui semble triste, elle attend quelqu’un qui ne vient pas...
Pour moi, la plage nous raconte le monde, nous dévoile une part intime de nous-même. La plage est un lieu où la société s’idéalise, se stylise, se relâche, se désire. Et ce qui est normal en bord de mer devient impudique sur le macadam dix mètres plus loin.
Dans ce film, j’ai souhaité suivre quelques jeunes adultes et seniors dans différents décors de Bretagne que je connais bien : d’un côté, sur la côte nord, entre Locquirec et Perros-Guirec, puis, de l’autre, sur la côte sud, entre Nevez et Arzon. Il était important pour moi de pouvoir immerger le spectateur entre le sud et le nord de la Bretagne, tant les trajectoires de vie peuvent différer d’un monde à l’autre. À certains endroits, il y a les jeunes citadins habitués à venir montrer leur silhouette bien taillée l’été, à d’autres, il y a les habitués des plages aux réputations de réservées aux vieux, aux voyeurs, aux dragueurs...
Ainsi, le film nous interroge : pourquoi la plage déclenche-t-elle autant de sentiments et d’histoires d’amour ? Comment le bord de mer fait-il de nous des êtres sensuels, enclins à aimer de façon absolue ? Ce qui m’intéressait de raconter en suivant ces personnages, c’est cette véritable transformation des corps et des sentiments que provoque le milieu du bord de mer. Peu à peu, l’effervescence de la mer nous amène à nous libérer, à désirer, à avoir envie d’aimer.
Par ailleurs, le film est aussi un écho à cette jeunesse d’aujourd’hui : comment les jeunes adultes déploient-ils leurs rapports sentimentaux à la plage, quels rapports ont-ils avec le vu, le toucher et le ressenti dans cet espace naturel si particulier ?
Ainsi, le film part de l’intime de chacun des personnages pour se rapprocher de l’universel. Sur la serviette de bain, nous devenons des acteurs et chacun joue son rôle : un don Juan, une Juliette, une femme désireuse mais inaccessible... C’est ainsi que je vois la plage : une grande scène de théâtre où chacun se dénude, endosse un rôle puis se rhabille.

BIOGRAPHIE

Corentin Pichon

Corentin Pichon

Corentin Pichon est réalisateur de films. Il grandit dans le Trégor en Bretagne, puis il fait des études de philosophie et de cinéma à Rennes, Paris, Bruxelles. Il réalise des films documentaires tels que Au bord des mères et Soudain la nuit, des clips musicaux, des films publicitaires et des fictions. Son travail s’étend sur une pratique plurielle du cinéma, alliant expérimentation et narration. En 2018, il réalise avec Céline Ters une fiction sonore en 3D, Vent clair, adapté d’une nouvelle du cinéaste russe Andreï Tarkovski, avec Richard Bohringer, Benoît Magimel et Zacharie Chasseriaud. À chaque projet, l’envie est forte d’explorer les images et les sons pour s’approcher un peu plus du sensible, et surtout de l’humain.

REVUE DU WEB

Les vacances à la plage

FRANCE 3 >>> À l’occasion de la sortie du documentaire La Plage des sentiments, l’anthropologue Jean-Didier Urbain nous parle de ses études sur le comportement des vacanciers à la plage.

FRANCE CULTURE >>> Retracer l’histoire des stations balnéaires, et du besoin grandissant de vacances dans la société française des Trente Glorieuses.

RADIO FRANCE >>> Sur le sable fin du Val André, en Bretagne, se mêlent les corps et leurs histoires. Les vacanciers se regardent, s'observent du coin de l'oeil, ou s'assument et profitent simplement de la mer. Chacun décrit son rapport au corps, et au corps des autres.

HUFFINGTON POST >>> Le gouvernement espagnol s’est fendu d’une campagne qui déculpabilise les femmes qui vont à la plage sans avoir un corps conforme aux standards de beauté.

COMMENTAIRES

  • 15 Mai 2023 21:41 - Yvon

    Magnifique, mon enfance une plage où toutes les générations ont été et vont y aller

CRÉDITS

réalisation Corentin Pichon
image Nedjma Berder

montage Gaëlle Villeneuve
mixage Vincent Texier
étalonnage Didier Gohel

coproduction Aligal production et France Télévisions
avec le soutien du CNC

Artistes cités sur cette page

Corentin Pichon réalisateur

Corentin Pichon

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